Il est tristement célèbre pour être l’un des passages migratoires les plus dangereux au monde. La région du Darién, forêt marécageuse située entre la Colombie et le Panama, est au cœur de la nouvelle exposition présentée à la Maison de l’Amérique latine. Avec Et nous voici, déchirés, Isabel De Obaldia révèle la réalité brute de celles et ceux qui traversent ce territoire au péril de leur vie, dans l’espoir d’un avenir meilleur. Pour sa première exposition en France, l’artiste franco-panaméenne ouvre un espace rare où l’art devient à la fois acte de mémoire, de solidarité et de vérité.


Isabel De Obaldia, une artiste engagée

Née à Washington D.C. en 1957 de parents franco-panaméens, Isabel De Obaldia a grandi au Panama, où son père, Guillermo Trujillo, était un peintre reconnu. Depuis plus de quarante ans, cette artiste pluridisciplinaire qui a présenté son travail dans de nombreuses expositions au Panama, aux États-Unis et en Europe, développe une œuvre profondément engagée, attentive aux bouleversements politiques du Panama — de la dictature de Manuel Noriega à l’invasion américaine — mais aussi aux désastres contemporains à l’échelle mondiale.

Lorsque les chars américains envahissent les rues de Panama en décembre 1989, l’artiste documente déjà depuis plusieurs années la violence du régime militaire. Ses dessins clandestins représentant des corps jetés à la mer depuis des hélicoptères, comme ses peintures dénonçant la répression, ne se limitent pas au témoignage : ils révèlent une capacité singulière à transformer la brutalité de l’histoire pour affirmer l’art comme un outil de résistance.

Portrait de Isabel De Obadia
Portrait de Isabel De Obaldia dans son atelier au Panama (2024) © Maison de l’Amérique latine

Une catastrophe humaine et écologique

À la Maison de l’Amérique latine, l’artiste déploie une installation immersive mêlant grands dessins, corps de verre coloré, son et vidéo. Elle y donne à voir la catastrophe humaine et écologique qui ravage la région du Darién. Son œuvre rend compte du désastre engendré par un flux migratoire longtemps massif — véritable transit du désespoir — dont l’assèchement brutal actuel produit, à son tour, de nouvelles formes de violence.

Isabel de Obadia, Rivière (2025)
Isabel De Obaldia, Rivière (2025) © Sebastián Icaza

Comme le souligne Nadeije Laneyrie-Dagen, la commissaire de l’exposition, « celles et ceux qui ont traversé l’enfer avant d’être contraints au retour, les populations locales prises en otage par des mouvements incohérents, et la jungle elle-même, prolifique, admirable et défigurée, sont les héros de cette installation immersive ».

Avec Et nous voici, déchirés, Isabel De Obaldia interroge les frontières et les migrations contemporaines à travers une exposition à la fois politique et poétique. En rendant visibles des vies suspendues, piégées dans la jungle, l’artiste propose un regard profondément humain, invitant à repenser notre responsabilité collective.

Crédits photo principale : Isabel De Obaldia, Et nous, voici déchirés / Sebastián Icaza


INFORMATIONS PRATIQUES


Tourbillon, Isabel De Obadia
Isabel De Obadia, Tourbillon (2025) © Sebastián Icaza
  • TITRE : Isabel De Obaldia
  • LIEU : Maison de l’Amérique latine
  • ADRESSE : 217, Bd Saint-Germain 75007 Paris
  • HORAIRES : Du lundi au vendredi de 10h00 à 20h00 et le samedi de 14h à 18h. Fermé dimanche et jours fériés.
  • DATES : jusqu’au 26 février
  • ENTRÉE : entrée gratuite
  • RENSEIGNEMENTS : Maison de l’Amérique latine