De l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ! En matière de danse flamenco, ce crédo cher à Danton sied parfaitement à Israel Galván qui, de spectacle en spectacle, n’a de cesse de repousser les limites de son art. El Amor Brujo qu’il présentera du 5 au 11 juillet à l’Espace Pierre Cardin à Paris ne fait bien évidemment pas exception.


À LA CROISÉE DU CLASSIQUE ET DU CONTEMPORAIN

Pour la première fois de sa carrière, le danseur andalou s’est donné pour objectif de revisiter un classique du répertoire espagnol. Et quel classique, puisqu’il s’agit ni plus ni moins que d’El amor brujo – l’Amour sorcier en français – de Manuel de Falla, une « gitanerie musicale » en seize tableaux pour orchestre de chambre et cantaora. Une œuvre initialement écrite en 1915 et qui connaîtra rapidement de multiples adaptations, d’abord une version symphonique initiée dès 1916 par de Falla lui-même, puis une version sous forme de ballet proposée par Antonia Mercé, dite La Argentina, qui connaîtra un franc succès à l’orée des années 30.

Cette pièce nous relate l’histoire d’un fantôme qui revient inlassablement hanter une femme gitane, Candela. Ce fantôme n’est pas un inconnu. En effet, il s’agit de l’âme de son mari prématurément disparu, un homme qu’elle n’aimait pas. Afin de s’en débarrasser, elle a l’idée de recourir à la magie afin de le faire tomber amoureux d’une autre. Elle aura ainsi la paix et pourra se livrer corps et âme à Carmelo, son tout nouvel amant.

Une histoire entre drame et fantaisie qui sied à merveille aux arabesques avant-gardistes du danseur andalou !

ISRAEL GALVÁN L’ICONOCLASTE

Briser les images d’Épinal et les idées préconçues ? Israel Galván est depuis longtemps passé maître en la matière, aussi, ne vous étonnez pas s’il endosse de facto le rôle de Candela la gitane et qu’il insuffle à cette pièce un véritable élan de liberté. En dépouillant l’œuvre originale de tous ses oripeaux superflus – mais aussi en incluant des pages que De Falla lui-même avait écarté lors de son écriture – il en atteint le coeur nucléaire, laissant entrevoir toute la modernité qu’elle portait en elle dès sa création. Sur scène, sa performance sous des traits féminins relève moins du travestissement que de l’Actors Studio. Israel Galván danse comme une femme, respire comme une femme, vibre comme une femme. Il en capte l’énergie vitale et en restitue toute une palette d’émotions.

Musique et chant sont quant à eux réduits à leur plus simple expression. La partition minimaliste délivrée par ses fidèles compagnons de route, Alejandro Rojas-Marcos au piano préparé et David Lagos au chant, ne manque pourtant pas de piquant, ce dernier allant même jusqu’à mixer sa propre voix à celle d’une cantaora spectrale surgie d’un vieux 78 tours.  

En s’emparant de cette pièce traditionnelle pour laquelle il nourrit des sentiments très ambivalents – une madeleine de Proust musicale dont il honni le traitement folklorique dont elle s’est souvent vue affublée – Israel Galván parvient une fois de plus à nous surprendre, inscrivant sa démarche artistique dans la quête d’un éternel défi. 


INFORMATIONS PRATIQUES


Israel Galván © Daniel Mpantiga
  • TITRE : El Amor Brujo
  • LIEU : Théâtre de la Ville – Espace Pierre Cardin, 1 Avenue Gabriel 75008 Paris M° Concorde
  • AVEC : Israel Galván, Eduarda de los Reyes, David Lagos (chant), Alejandro Rojas-Marcos (piano), Alfredo Lagos (guitare)
  • DATES : Du 5 au 11 juillet
  • HORAIRES : 20H / 15H le dimanche 11 juillet
  • TARIF : 10-27 €
  • RENSEIGNEMENTS : www.theatredelaville-paris.com
  • TÉLÉPHONE : 01 42 74 22 77