Excellente initiative que de demander au toujours très éclectique Jean-Paul Gaultier de concevoir une exposition alliant mode et septième art. Le couturier met non seulement en scène ses plus audacieuses pièces pour le cinéma, mais il évoque aussi les films qui ont marqué son imaginaire comme créateur et présente ainsi au moyen d’une scénographie éblouissante des costumes emblématiques de l’histoire du cinéma.


HENRI LANGLOIS ET LES ROBES DES STARS

Pendant des années, Henri Langlois, l’un des pères fondateurs de la Cinémathèque Française, a demandé aux stars américaines en visite à Paris de lui ramener un costume de l’un de leurs rôles les plus mémorables. Il les a gardés pour la Cinémathèque Française avec un fétichisme propre aux passionnés de cinéma.

Mais comment mettre tous ces costumes en valeur ? La regrettée Tonie Marshall trouve la solution en appelant son grand ami Jean-Paul Gaultier dont les collaborations avec des réalisateurs aussi différents qu’Almodóvar ou Luc Besson ont marqué les esprits.

Photographie des coulisses du film Qui êtes-vous Polly Maggoo ? 1966 / © William Klein – Films Paris New-York

Le couturier est rapidement enthousiasmé par ce projet qu’il prend à bras le corps. Cinémode dévoile avec beaucoup d’audace la fascinante histoire personnelle que ce créateur hors pair entretient avec le septième art.

LE CINÉMA SELON JEAN-PAUL GAULTIER

Bien souvent, les films sont de grands révélateurs de nos envies et nos désirs les plus enfouis. Pour Jean-Paul Gaultier, ce fut bien évidemment le cas : « Sans le défilé de Falbalas, je n’aurais jamais fait ce métier » affirma-t-il. Rien d’étonnant que ce chef-d’œuvre réalisé par Jacques Becker en 1945 et que Gaultier découvre à l’âge de 13 ans trouve une place de choix dans l’exposition.

Un deuxième long-métrage qui a marqué l’univers rebelle et pop de Gaultier est Qui êtes-vous Polly Maggoo ? (1966) du photographe américain William Klein. Un regard acéré et critique du monde de la publicité et de la mode dominé à l’époque par le Space Age.

Et Dieu…créa la femme de Roger Vadim, 1956 / © 1956 TF1 STUDIO avec l’aimable autorisation de la succession Roger Vadim


La mode futuriste des années 60, dont l’un des précurseurs est Paco Rabanne, est aussi très présente dans Cinémode : Blow-Up de Michelangelo Antonioni (1966), Barbarella de Roger Vadim (1968) et 2001 l‘Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick (1968).

Avec une scénographie très soignée où photos, séquences de films et costumes sont parfaitement mis en valeur, vous retrouverez Marilyn Monroe, archétype de la femme objet sophistiquée dansant face à Brigitte Bardot, habillée tout simplement, qui danse également et se déchaîne dans Et Dieu… créa la femme.

L’univers masculin et son évolution sont également évoqués par Gaultier : John Wayne cowboy et macho, Sylvester Stallone et son culte du corps ou encore Marlon Brando, dans Un tramway nommé désir (1951) d’Elia Kazan, figure d’une nouvelle masculinité prolétaire d’un érotisme débordant

Mention spéciale aux créations de Jean-Paul Gaultier pour le cinéma de Pedro Almodóvar ! Entre les deux hommes, il s’agit d’une collaboration de longue date qui a commencé dès 1994 avec la tenue de Victoria Abril dans Kika. Cette tenue fait partie de l’exposition ainsi que la robe de travesti de Gabriel García Bernal dans La Mauvaise Education.

Cinémode, dédié à sa grand amie Tonie Marshall, est un show prodigieux à l’image de Jean-Paul Gaultier, ainsi qu’une magistrale leçon de mode et de cinéma. Une exposition qui présente les costumes de façon unique, comme une partie essentielle à la construction d’un personnage.

Crédits photos : Nacho Pinedo (portrait d’Almódovar, Victoria Abril el Jean-Pierre Gaultier )


INFORMATIONS PRATIQUES


Affiche de Cinémode
  • TITRE : Cinémode
  • ADRESSE : 51, rue de Bercy 75012 Paris
  • HORAIRES : tous les jours sauf mardi
  • DATES : Jusqu’au 16 janvier 2022
  • TARIF : 6 – 12 €
  • RENSEIGNEMENTS : Cinemathèque Française