Samuel Fosso à la MEP

Le photographe caméléonique

Samuel Fosso, Autoportrait Série « Tati », La Femme américaine libérée des années 70, 1997 © Samuel Fosso. Courtesy Jean-Marc Patras / Paris

Le photographe franco-camerounais Samuel Fosso investit la MEP avec ses clichés avant-gardistes. Cet artiste qui, dès son plus jeune âge, affichait une grande liberté de ton, questionne le genre et la sexualité tout en s’intéressant à la pop culture et à la mode. L’exposition dévoile le parcours de ce photographe charismatique qui a fait du portrait et de l’autoportrait son terrain de jeu, révélant ainsi un univers singulier qui porte un regard neuf et avisé sur le monde.


PHOTOGRAPHIE ET PERFORMANCE

À l’image de Malick Sidibé et Seydou Keïta, Samuel Fosso appartient à cette longue lignée africaine de la photographie de studio. Il a aussi largement contribué à réinventer ce genre photographique, très populaire en Afrique de l’Ouest, en se plaçant face à l’objectif de son appareil photo. 

À la manière d’un acteur de cinéma, en donnant libre cours à son imagination, il se sert de son corps, de divers accessoires et de vêtements pour mettre en scène différents personnages. Grâce à ce procédé, il déconstruit les représentations stéréotypées en matière d’identité de genre et de classes sociales et nous invite à une réflexion sur le pouvoir des images.

Samuel Fosso, Autoportrait Série « Tati », Le Golfeur, 1997 © Samuel Fosso. Courtesy Jean-Marc Patras / Paris

DE BANGUI À PARIS

Les premières salles accueillent des clichés réalisés entre 1970 et 1990, une période clé dans la carrière de l’artiste qui a ouvert son propre studio dès l’âge de 13 ans.  Vous aurez ainsi l’occasion de découvrir des travaux de commande du jeune Fosso réalisés au sein du Studio Photo National, ainsi que ses premiers autoportraits, pour la plupart en noir et blanc.

« Je voulais que les gens de République centrafricaine qui entraient dans ce studio le considèrent comme le leur. C’était l’occasion de revendiquer une identité, car nous venions juste d’accéder à l’indépendance » explique-t-il.

L’exposition se poursuit par la série « Tati », réalisée en 1977. Pour fêter ses 50 ans, la marque fait appel à un groupe de photographes de renommée internationale. Parmi eux, Samuel Fosso. À cette occasion, le photographe réalisa une dizaine d’autoportraits avec les vêtements de l’enseigne. Ces personnages, Le Golfeur, Le Rockeur, La Femme américaine libérée, archétypes de la culture occidentale, seront exposés sur les murs de la célèbre boutique de Barbés à Paris.

Vous pourrez également admirer une série de photos réalisées en 1999 en partenariat avec l’édition française du magazine Vogue pour son édition automne/hiver. Dans ces images réalisées dans son studio à Bangui, Samuel Fosso incarne à merveille plusieurs personnages dans une mise en scène saisissante.

Samuel Fosso, Autoportrait – Serie « Tati », Le Chef (celui qui a vendu l’Afrique aux colons), 1997 – © Samuel Fosso courtesy Jean-Marc Patras / Paris

SAMUEL FOSSO INTIME

Après ces collaborations emblématiques, l’exposition dévoile la série « Mémoire d’un ami » (2000). Une fois de plus, le photographe se positionne devant l’objectif pour rendre hommage à son ami, Tala, tué par la milice armée centrafricaine à Bangui.

Cette première partie de l’exposition se termine avec « Le rêve de mon grand-père »Samuel Fosso est né avec une paralysie partielle des membres inférieurs, un événement qui marquera à jamais sa vie. À tout juste quatre ans, sa mère l’envoie chez son grand-père, un chef et médecin traditionnel Igbo afin que celui-ci le soigne, avec succès. Cette série permet à Samuel Fosso de renouer avec son passé et les traditions de ses ancêtres.

L’HISTOIRE DU XXÈME SIECLE

La deuxième partie de l’exposition est consacrée aux personnages iconiques de l’Histoire du XXème siècle. Elle s’ouvre avec « African Spirits » (2008), une série de portraits dans laquelle Fosso remet en scène les portraits cultes des figures emblématiques du mouvement de la décolonisation et de l’indépendance en Afrique et du mouvement des droits civiques et de la lutte contre la discrimination aux États-Unis.

Avec la série toute en couleur « Emperor of Africa », Samuel Fosso incarne Mao Zedong, mettant en scène l’iconographie officielle du leader chinois. Sa façon à lui de dénoncer le pouvoir que la Chine exerce sur le continent africain depuis des années.

Mention spéciale à la série consacrée au pape noir, « Black Pope », dans laquelle le photographe franco-camerounais se met dans la peau d’un pape noir et cible ainsi les hautes institutions de l’Église catholique.

La dernière salle, dévoile le 666 autoportraits Polaroids, sérié intitulée « SIXSIXSIX » (2015-2016) dans laquelle il donne libre cours aux émotions qui le traversent.

Samuel Fosso, Autoportrait – Série « African Spirits », 2008 © Samuel Fosso coutesy Jean-Marc Patras / Paris

SWINGUERRA

Pour accompagner le travail de Samuel Fosso, le studio de la MEP accueille pour la première fois à Paris la célèbre installation vidéo Swinguerra du duo germano-brésilien Bárbara Wagner & Benjamin de Burca. Ce film-installation, présenté dans le pavillon brésilien lors de la Biennale de Venise en 2019, célèbre la culture urbaine des chorégraphes et danseurs transgenres brésiliens.

Le duo germano-brésilien a conçu Swinguerra en collaboration avec des chanteurs, des danseurs et des chorégraphes vivant à Récife, ville dans laquelle résident également les deux artistes. Avec cette installation vidéo, ils proposent une sorte de « bataille » prenant la forme d’un concours chorégraphique entre trois groupes de danseurs. Le visiteur, placé entre deux écrans de projection, devient le spectateur privilégié ainsi que le jury d’un concours qui se déroule sous ses propres yeux.

Bárbara Wagner & Benjamin de Burca, Swinguerra, 2019 – Courtesy of the artists and Fortes D’Aloia & Gabriel, Sao Paulo / Rio de Janeiro.

Swinguerra est une création visuellement puissante, féerique, qui traverse l’écran de part en part et donne la parole à ceux que la société brésilienne met à l’écart.

Crédits photos : Samuel Fosso, Autoportrait Série « Tati », La Femme américaine libérée des années 70, 1997 – © Samuel Fosso. Courtesy Jean-Marc Patras / Paris (photo de couverture)


INFORMATIONS PRATIQUES


Affiche de l’exposition Samuel Fosso
  • TITRE : Samuel Fosso
  • ADRESSE : 5-7, rue de Fourcy 75004 Paris
  • HORAIRES D’OUVERTURE : les mercredis et vendredis de 11h à 20h. Le jeudi de 11h à 22h. Les samedis et dimanches de 10h à 20h. Fermé lundi et mardi.
  • DATES : Jusqu’au 13 mars 2022
  • TARIF : 10 € – 6 €
  • RENSEIGNEMENTS : Maison Européenne de la Photographie

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